Sujet
ÉTATS-UNIS (Virginie) : Percy Levar Walton, Noir , 28 ans
Action Urgente Peine de Mort
AMR 51/176/2006
Levar Walton doit être exécuté en Virginie le 8 décembre 2006. Il a été condamné
à la peine capitale en 1997 pour un triple meurtre commis à Danville en novembre
1996, celui d’un couple de Blancs âgés, Elizabeth Hendrick, quatre-vingt-un ans,
et Jesse Hendrick, quatre-vingts ans, et d’un Noir de trente-trois ans, Archie
Moore.
Le 8 juin 2006, le gouverneur Timothy Kaine lui a accordé un sursis environ
soixante minutes avant l’heure à laquelle il devait être exécuté. Le but de ce
sursis de six mois était de permettre la réalisation d’une évaluation de
l’aptitude de Percy Levar Walton à être exécuté, c’est-à-dire de son aptitude à
comprendre pour quels motifs la peine de mort a été prononcée à son encontre et
à appréhender la réalité de ce châtiment. Cette évaluation doit avoir lieu
prochainement, et sera effectuée par trois professionnels de la santé mentale,
respectivement choisis par la défense, l’accusation et un juge fédéral.
En 1999, trois spécialistes de la santé mentale ont estimé que Levar Walton
présentait une grave forme de schizophrénie et qu’il souffrait probablement déjà
de cette affection au moment des faits. Levar Walton, qui avait dix-huit ans et
un mois lorsqu’il a commis les meurtres, a manifesté des signes de maladie
mentale dès l’âge de seize ans. Il a exprimé des croyances bizarres et a eu des
comportements inappropriés après son arrestation, en détention provisoire et
pendant son procès. En 1999, dans une déclaration sous serment, l’avocat qui
l’avait représenté en première instance a déclaré : « [il] ne nous a pas
réellement aidé à préparer sa défense. » Il a ajouté : « nous n’avons pas réussi
à convaincre M. Walton qu’il ne reviendrait pas à la vie [s’il était exécuté] ».
Dans un premier temps, avant le procès, Levar Walton a indiqué qu’il voulait
plaider coupable. Puis, en septembre 1997, il a déclaré à son avocat qu’il
voulait plaider non coupable et comparaître devant un jury populaire parce qu’il
était innocent. Quelques jours plus tard, il changeait d’avis et reconnaissait
de nouveau sa culpabilité. À la fin du mois, quand on lui a demandé s’il
plaiderait coupable ou non, il a refusé de s’exprimer, écrivant, pour toute
réponse, le mot « chaise » sur un bout de papier. Il a dit à son avocat qu’il
voulait être exécuté pour « revenir à la vie et pouvoir être avec ses chéris. »
Devant le tribunal, en octobre 1997, Levar Walton a indiqué au juge qu’il avait
commis ces trois meurtres et qu’il plaidait coupable ; le magistrat a déclaré
cette position recevable et, à l’issue d’une audience sur la peine au cours de
laquelle aucun élément relatif à la santé mentale de l’accusé n’a été produit,
l’a condamné à mort.
La santé mentale de Levar Walton s’étant dégradée dans le couloir de la mort
(les registres de la prison le décrivent comme un prisonnier « dans un état de
psychose floride » et apparemment peu préoccupé par son exécution imminente), la
principale question qui a été évoquée est de savoir s’il est juridiquement en
état de démence et par conséquent inapte à être exécuté. Aux termes de l’arrêt
Ford c. Wainwright, rendu en 1986 par la Cour suprême fédérale, l’exécution de
personnes juridiquement en état de démence est anticonstitutionnelle. Toutefois,
cette décision n’offre qu’une protection limitée. Aussi, l’interprétation de
l’arrêt Ford continue à susciter des dissensions au sein des juridictions
inférieures, y compris dans l’affaire Walton.
Selon certains éléments, le quotient intellectuel de Levar Walton le situe au
mieux à la limite du retard mental et correspond à l’âge mental d’un jeune
enfant. Si les crimes pour lesquels Levar Walton a été condamné à mort avaient
été commis cinq semaines plus tôt, celui-ci aurait eu dix-sept ans et sa
condamnation à mort aurait été illégale aux termes de la législation des
États-Unis et du droit international. En tout état de cause, Levar Walton
présente un développement intellectuel inférieur à celui de la plupart des
personnes âgées de dix-huit ans.
En 2002, dans l’arrêt Atkins c. Virginia, la Cour suprême fédérale a interdit
l’application de la peine capitale à des personnes présentant un retard mental.
Elle a jugé que cette affection limitait la culpabilité personnelle des accusés
et leur aptitude à mesurer les conséquences de leurs actes, et qu’il était par
conséquent impossible, pour ce type de délinquants, de justifier le recours à la
peine de mort par les notions de « juste châtiment » ou de dissuasion. Amnesty
International estime qu’il est particulièrement incohérent de protéger de la
peine de mort les personnes atteintes de retard mental sans en exempter celles
qui souffrent de graves maladies mentales. En effet, l’argument de la
culpabilité réduite, de la plus grande vulnérabilité et des capacités limitées
vaut aussi pour les personnes atteintes d’une maladie mentale grave (voir le
document intitulé USA : The execution of mentally ill offenders, index AI : AMR
51/003/2006, janvier 2006, http://web.amnesty.org/l
ibrary/pdf/AMR510032006ENGLISH/$File/AMR5100306.pdf).
Depuis la reprise des exécutions judiciaires aux États-Unis en 1977, les
autorités de ce pays ont ôté la vie à 1 056 personnes, dont 98 en Virginie. En
1999, James Gilmore, alors gouverneur de cet État, a commué la sentence capitale
sous le coup de laquelle se trouvait Calvin Swann, au motif que cet homme
souffrait de schizophrénie depuis la fin de son adolescence. Calvin Swann avait
été défendu par le même avocat que Percy Levar Walton et avait comparu devant le
même juge et le même représentant du ministère public.